
Analyse de "Wild Wild West" : un film steampunk sous-estimé ?
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Lorsque l’on parle de cinéma steampunk, des titres comme La Cité des enfants perdus ou Le Château ambulant reviennent souvent. Pourtant, un film hollywoodien des années 1990, souvent moqué à sa sortie, mérite peut-être aujourd’hui d’être réévalué : Wild Wild West (1999), réalisé par Barry Sonnenfeld et porté par Will Smith et Kevin Kline. Longtemps catalogué comme un échec critique et commercial, ce long-métrage pourrait bien être une œuvre steampunk injustement mésestimée.
Dans cet article, nous allons explorer en profondeur ce film : son contexte de production, son esthétique, ses thématiques et sa place dans l’histoire du steampunk au cinéma. Nous tenterons de répondre à cette question : Wild Wild West est-il un film steampunk sous-estimé ?
Contexte de production : Hollywood rencontre le rétrofuturisme
Sorti en 1999, Wild Wild West est l’adaptation d’une série télévisée américaine diffusée dans les années 1960. Ce western de science-fiction, à mi-chemin entre James Bond et Bonanza, avait déjà une forte dose d’anticipation rétro. Le film tente de moderniser cette base en y injectant de l’humour, du spectaculaire et une esthétique steampunk assumée.
Le projet voit le jour dans la foulée du succès de Men in Black (1997), du même réalisateur et avec Will Smith. La Warner Bros mise alors sur un blockbuster estival. Pourtant, malgré un budget colossal de 170 millions de dollars, le film n’obtient que 222 millions au box-office mondial, un score jugé décevant par les standards hollywoodiens.
Mais derrière ces chiffres se cache une proposition artistique audacieuse qui mérite une relecture, notamment à travers le prisme du steampunk, ce genre qui mêle technologie anachronique, esthétique victorienne et esprit de rébellion.
Une esthétique steampunk flamboyante
Dès les premières images, Wild Wild West impose un univers visuel singulier. Nous sommes dans une Amérique post-Guerre de Sécession où les trains à vapeur côtoient des inventions incroyables : araignées mécaniques géantes, fauteuils d'exécution magnétiques, lunettes multifonctions… Tout est imprégné de technologies avancées, mais stylisées à la manière du XIXe siècle.
Machines extravagantes et rétro-ingénierie
Le clou du spectacle est sans doute la tarentule mécanique géante, pilotée par le méchant du film, le docteur Arliss Loveless (incarné par Kenneth Branagh). Cette créature steampunk par excellence incarne le délire rétro-futuriste du genre, tout en renvoyant à une critique de l'obsession pour la domination technologique.
Le film regorge également de gadgets victoriens délirants : une ceinture magnétique qui attire les balles, des lunettes à vision thermique façon “Tesla”, ou encore un fauteuil roulant transformé en centrale de commandement. Le mélange entre ingéniosité artisanale et progrès technologique détourné s’inscrit dans l’ADN du steampunk.
Costumes et décors
Les costumes, signés Deborah L. Scott (Titanic), sont eux aussi un hommage à l’esthétique victorienne. Des redingotes ajustées aux corsets métalliques portés par Salma Hayek, tout respire le steampunk, avec une touche d’exagération hollywoodienne.
Les décors alternent entre villes poussiéreuses du Far West et laboratoires souterrains anachroniques. Le train du duo West-Gordon, qui sert de QG ambulant, est un bijou de rétro-technologie, bourré de compartiments secrets et d’outils high-tech.
Des thématiques steampunk en filigrane
Au-delà de l’esthétique, Wild Wild West s’inscrit également dans la tradition narrative du steampunk, à travers plusieurs thématiques fortes :
La confrontation entre progrès scientifique et éthique
Le docteur Loveless, ancien scientifique confédéré mutilé pendant la guerre, représente la science dévoyée au service de la vengeance et de la domination. Son obsession pour les machines, et son mépris de la vie humaine, en font un archétype de savant fou steampunk.
Ce personnage interroge : où placer la limite du progrès ? Peut-on contrôler la technologie sans qu’elle ne nous échappe ? Ces questions sont au cœur du steampunk, qui questionne souvent les dérives possibles d’une société trop fascinée par la machine.
Une uchronie alternative
Le film propose une uchronie, c’est-à-dire une histoire alternative où certains événements historiques sont réécrits. Ici, le Sud vaincu de la guerre de Sécession tente un retour par la force technologique. C’est une approche typiquement steampunk, genre qui adore jouer avec les “et si ?” de l’histoire.
Sur notre site Steampunk-One, nous avons déjà exploré à quel point les uchronies sont un terrain fertile pour le genre : elles permettent de critiquer le passé tout en interrogeant le présent. Wild Wild West s’inscrit dans cette démarche, même s’il le fait avec humour et légèreté.
Le duo de héros : science vs action
Le tandem entre Jim West (Will Smith), homme d’action, et Artemus Gordon (Kevin Kline), inventeur farfelu, incarne un autre trope steampunk classique : la rencontre entre muscles et cerveaux, entre instinct et invention. Leurs disputes, leurs inventions improvisées et leurs complémentarités rappellent des duos littéraires tels que Holmes et Watson ou Passepartout et Fogg.
Une réception injustement sévère ?
Si Wild Wild West a été aussi critiqué à sa sortie, c’est en grande partie à cause de l’écart entre les attentes du public et le produit fini.
Un humour trop décalé ?
Le film assume un ton absurde et burlesque, parfois proche de la parodie. Beaucoup de spectateurs ont été désarçonnés par ce mélange de western, de science-fiction et de comédie. Pourtant, cette légèreté est fréquente dans le steampunk, notamment dans sa version visuelle (Steamboy, The Adventures of Brisco County, Jr.).
Aujourd’hui, avec le recul, cet humour apparaît comme précurseur des mash-ups modernes, ces œuvres hybrides qui mélangent les codes et les époques sans complexe.
Le rejet critique
Le film a été nommé à plusieurs Razzie Awards, et même Will Smith a reconnu publiquement que ce n’était pas son meilleur choix de carrière. Pourtant, une partie du public continue à défendre Wild Wild West comme un film culte incompris, surtout dans les communautés geeks et steampunk.
Sur Steampunk-One, de nombreux lecteurs partagent ce sentiment : si le film n’est pas parfait, il a le mérite de proposer un univers cohérent, visuellement spectaculaire, et profondément steampunk.
Wild Wild West dans le paysage steampunk
Aujourd’hui, le film gagne en reconnaissance parmi les amateurs du genre. Il a inspiré des cosplayeurs, des créateurs de props et même certains jeux de rôle.
Un objet pop culturel steampunk
À l’instar de The League of Extraordinary Gentlemen, Van Helsing ou encore The Golden Compass, Wild Wild West appartient à cette vague de films des années 1990-2000 qui ont préfiguré le boom du steampunk dans la culture populaire.
Ces films, bien qu’imparfaits, ont ouvert la voie à un intérêt plus large pour le genre. Ils ont permis de poser les bases visuelles et narratives sur lesquelles des œuvres plus abouties viendront plus tard capitaliser.
Une source d’inspiration
Le design de la tarentule mécanique, les gadgets, les décors… tout cela a nourri l’imaginaire collectif steampunk, au point que certains éléments du film sont devenus des classiques dans les conventions ou les fan arts.
Pourquoi faut-il redonner une chance à Wild Wild West ?
Voici quelques bonnes raisons pour lesquelles Wild Wild West mérite d’être redécouvert, notamment par les passionnés de steampunk :
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Il propose une esthétique steampunk riche et variée, rarement égalée dans un film grand public.
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Il explore les thématiques centrales du genre : technologie vs éthique, uchronie, inventions folles.
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Il a été victime de son époque : jugé à l’aune des blockbusters traditionnels, il n’a pas été compris comme une œuvre de genre.
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Il a influencé, consciemment ou non, la culture steampunk visuelle, au cinéma comme dans la mode alternative.
Sur Steampunk-One, nous défendons l’idée que le steampunk est un univers vaste, protéiforme, et parfois injustement marginalisé. Wild Wild West est un excellent exemple de la richesse que peut offrir ce genre, même dans des formats inattendus.
Conclusion : redécouvrir Wild Wild West avec des lunettes steampunk
Oui, Wild Wild West a ses défauts. Son scénario est parfois bancal, son humour inégal, et certaines scènes peuvent sembler caricaturales. Mais c’est aussi une œuvre d’une inventivité rare, un hommage déjanté au rétrofuturisme, et un film qui ose ce que peu d'autres tentent : créer un monde steampunk complet dans un blockbuster américain.
Avec plus de deux décennies de recul, il est temps de lui redonner une place dans la galaxie des œuvres steampunk. Non pas comme un chef-d'œuvre, mais comme un jalon important, un film-pont entre le grand public et un genre encore confidentiel à l’époque.
Vous êtes fan de steampunk ? Vous aimez les inventions absurdes, les décors à vapeur, et les uchronies explosives ? Alors n’hésitez pas à (re)voir Wild Wild West avec un œil nouveau.
Et pour aller plus loin dans l’exploration de ce genre foisonnant, retrouvez nos dossiers complets sur le cinéma steampunk, les grands classiques du genre et bien plus encore sur https://steampunk-one.com, votre portail dédié à l’univers rétrofuturiste.