Le rôle des femmes scientifiques du XIXe siècle dans les récits steampunk.

Le rôle des femmes scientifiques du XIXe siècle dans les récits steampunk.

Le steampunk, avec son esthétique rétrofuturiste, ses machines à vapeur, ses intrigues complexes et ses univers uchroniques, puise abondamment dans les codes du XIXe siècle. Pourtant, au-delà des rouages et des corsets, ce genre littéraire et artistique est aussi le terrain d’exploration de nombreux enjeux sociaux, notamment la place des femmes dans un monde technologique et patriarcal. Parmi les figures marquantes de cette relecture du passé : les femmes scientifiques.

Les récits steampunk offrent souvent aux lectrices et lecteurs des héroïnes brillantes, audacieuses, qui repoussent les frontières de la science dans un univers qui les cantonne pourtant à des rôles secondaires. Ce paradoxe crée une richesse narrative intense. Dans cet article, nous allons explorer l’origine, l’évolution et l’importance des femmes scientifiques du XIXe siècle dans les récits steampunk, tout en mettant en lumière les inspirations historiques qui nourrissent cette figure.


Le XIXe siècle : berceau d’une révolution scientifique... et féminine

Le XIXe siècle est synonyme de bouleversements scientifiques : l’industrialisation, les débuts de l’électricité, la médecine moderne, la mécanique, les communications. C’est aussi l’époque où les femmes commencent à prendre part activement à ces révolutions, malgré des résistances sociales importantes.

Des figures comme Ada Lovelace, Mary Anning, Marie Curie (fin du XIXe siècle), Caroline Herschel ou encore Émilie du Châtelet (même si cette dernière appartient au siècle précédent, son héritage persiste) inspirent une nouvelle génération. Le steampunk s’est emparé de ces figures pionnières pour les transformer en héroïnes emblématiques.


Une représentation symbolique dans le steampunk

Dans les récits steampunk, la femme scientifique n’est pas seulement un personnage secondaire. Elle est souvent l’élément moteur de l’intrigue : celle qui conçoit la machine révolutionnaire, qui perce les mystères de l’éther, qui comprend les mécanismes secrets des dirigeables ou des automates.

Loin d’être une simple image esthétique, la femme scientifique représente un contre-pouvoir : dans un monde dominé par les hommes, elle incarne la rupture, la modernité et parfois même l’émancipation féminine. C’est une vision à la fois subversive et réparatrice, où l’histoire alternative corrige l’oubli historique des grandes femmes de science.


De l’inspiration historique à la fiction steampunk

Ada Lovelace, la muse de la programmation

Ada Lovelace est sans doute la figure historique la plus célébrée dans le steampunk. Elle fut la première à concevoir une suite d’instructions destinée à une machine, bien avant l'invention de l'ordinateur moderne. Dans de nombreuses œuvres steampunk, Ada devient une figure tutélaire, une inventrice de génie, parfois ressuscitée ou même transformée en intelligence artificielle.

Dans The Difference Engine de William Gibson et Bruce Sterling, Ada est au cœur d’un monde alternatif où la machine analytique de Babbage a réellement été construite, changeant radicalement l’Histoire. Ce roman est l’un des textes fondateurs du steampunk moderne et donne à voir une version fascinante du pouvoir féminin par la science.

Mary Anning, l’archéologue oubliée

Découvreuse de fossiles au début du XIXe siècle, Mary Anning inspire souvent des personnages féminins archéologues, paléontologues ou aventurières dans les récits steampunk. Elle est à l’origine de nombreuses découvertes majeures, mais n’a jamais été reconnue officiellement à son époque.

Dans la fiction, elle devient le prototype de l’héroïne érudite et rebelle, qui explore les ruines oubliées, déterre des machines anciennes ou des créatures hybrides, flirtant avec les genres du fantastique et de l’horreur gothique.


Un archétype qui se décline : la femme savante dans tous ses états

Le steampunk joue énormément avec les archétypes, et la femme scientifique y trouve plusieurs déclinaisons, toujours au service d’un message plus profond.

L’ingénieure visionnaire

Personnage récurrent : elle construit des machines improbables, modifie des automates ou invente de nouvelles sources d’énergie. Elle est souvent marginalisée, rejetée par les académies, mais finit par imposer son génie. Ce personnage permet de poser des questions sur le sexisme scientifique, toujours actuel, et de réhabiliter des compétences trop longtemps ignorées.

L’alchimiste ou chimiste

Plus proche du laboratoire que de l’atelier, cette femme manipule les éléments, crée des élixirs, explore les lois invisibles de la matière. Elle incarne une vision mystique de la science, mais également une critique de l’empirisme masculin : elle lie intuition, savoir ancien et expérimentation. Elle est souvent associée à des éléments ésotériques ou orientaux dans l’esthétique steampunk.

La biologiste ou anatomiste

Explorant la frontière entre la vie et la mort, la femme biologiste dans le steampunk réinvente souvent les codes du Frankenstein de Mary Shelley. Parfois médecin, chirurgienne ou nécrobiologiste, elle incarne le pouvoir de redonner vie, ou au contraire de la retirer. Ces personnages servent souvent à questionner les limites morales de la science, mais aussi le pouvoir symbolique de la maternité inversée : créer la vie par la technique plutôt que par le corps.


L’esthétique steampunk au service de la représentation féminine

Le steampunk est un genre visuel autant que narratif, et la représentation des femmes scientifiques y est renforcée par une iconographie puissante : lunettes d’aviateur, blouses en cuir, instruments de mesure, corsets renforcés de métal, ceintures à outils…

Cette mise en scène offre un contrepoint au regard traditionnel sur les femmes du XIXe siècle. Elles ne sont plus de simples objets de désir ou des dames à sauver : ce sont des artistes de la mécanique, des cheffes d’atelier, des pionnières de l’électricité, des hackeuses de l’Empire victorien.

Sur steampunk-one.com, on célèbre justement cette esthétique, en explorant les multiples facettes du vestiaire steampunk, souvent détourné de son usage historique pour proposer une vision plus inclusive et libératrice du genre et de la technologie.


Des récits modernes qui réinventent l’héritage

“Leviathan” de Scott Westerfeld

Dans cette trilogie emblématique du steampunk pour jeunes adultes, le personnage de Deryn Sharp, une jeune fille déguisée en garçon pour rejoindre l’armée de l’air, incarne cette dualité du genre et de la science. Bien qu’elle ne soit pas une scientifique au sens classique, son génie mécanique et sa compréhension du monde technologique en font un symbole fort de la capacité des femmes à briser les carcans sociaux.

“Lady Mechanika” de Joe Benitez

Cette série de bandes dessinées propose une héroïne augmentée mécaniquement, détective et ingénieure. Lady Mechanika allie l’intelligence, la maîtrise technologique et l’indépendance. C’est l’exemple parfait d’une figure steampunk féminine moderne, nourrie par l’iconographie XIXe siècle mais libérée des limitations de l’époque.

“The Tea Master and the Detective” d’Aliette de Bodard

Dans un registre plus original, ce court roman de science-fiction teinté de steampunk propose une enquête menée par une détective qui pourrait s’apparenter à une version féminine de Sherlock Holmes. Le récit évoque les rôles scientifiques, la logique, l’expérimentation, tout en questionnant les normes de genre et de pouvoir.


Une portée féministe évidente

En mettant en avant des femmes scientifiques, le steampunk ne se contente pas de revisiter le passé : il propose une réécriture politique. C’est une manière de réparer les injustices historiques, de donner aux femmes les rôles qu’on leur a souvent refusés.

Il ne s’agit pas seulement de divertissement, mais d’un geste de réappropriation. Les autrices et auteurs de steampunk se posent la question : "Et si l’Histoire avait laissé plus de place aux femmes ? Que serait devenu le monde ?"

Ce questionnement résonne fortement aujourd’hui, dans une époque où la place des femmes dans les sciences reste encore un enjeu majeur.


L’avenir du steampunk et ses héroïnes

Avec l’essor des œuvres steampunk en Asie, en Amérique du Sud ou en Afrique, on voit aussi émerger des figures de femmes scientifiques non occidentales, inspirées par d’autres cultures, d’autres traditions scientifiques. Ces personnages enrichissent encore le genre et permettent de sortir de l’eurocentrisme parfois dominant dans le steampunk classique.

Le rôle des femmes scientifiques du XIXe siècle dans les récits steampunk est donc central, riche, évolutif. Il permet de lier passé et futur, réalité et fiction, oppression et émancipation.


Conclusion : réparer l’histoire par l’imaginaire

Les récits steampunk ne sont pas que des fantaisies rétrofuturistes. Ils posent des questions fondamentales sur notre société, notre passé, et nos futurs possibles. La place accordée aux femmes scientifiques est emblématique de ce pouvoir subversif : redonner la parole à celles qu’on a trop souvent effacées.

En réécrivant l’histoire avec des héroïnes brillantes, audacieuses et techniciennes, le steampunk devient un outil de mémoire et de transformation. À travers la lentille de l’uchronie, il réinvente le XIXe siècle comme un terrain d’égalité potentielle, où la science appartient à toutes et tous.

Sur steampunk-one.com, nous continuerons à explorer ces figures, ces récits et ces inspirations qui font du steampunk un genre à la fois esthétique, narratif et profondément engagé.


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